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18 Aug

Rencontre avec Jeanne Taris, photographe en immersion

Publié par Paul Tian  - Catégories :  #jeannetaris, #taris, #jeanne taris, #leica, #arles, #bourisp, #pyrénées, #visa pour l'image, #luchon, #polka, #6Mois, #rencontre, #gitan, #gitans de luchon, #andalousie, #camargue

Jeanne Taris devant les tirages de son expo "Gitans de Saint-Jacques" (Photo © Paul Tian)

Jeanne Taris devant les tirages de son expo "Gitans de Saint-Jacques" (Photo © Paul Tian)

Les belles rencontres sont souvent le fait du hasard. Ce hasard était présent, en juillet dernier, dans ce petit village pyrénéen de Bourisp, en Vallée d’Aure, à l’occasion des Journées Du Reportage (JDR) 2018.

 

J’avais découvert cette manifestation, en 2017, avec un bel enthousiasme, et je m’étais promis d’y revenir cette année. Mon emploi du temps étant particulièrement chargé, j’ai bien failli rater ces JDR…

 

Par chance, je suis passé un jour avant sa clôture, le 14 juillet…

 

L’an dernier, j’avais été particulièrement étonné du travail de Jeanne Taris, une photographe absolument inconnue pour moi, qui proposait une exposition intitulée « Gitanos de la Ciudad Sin Ley ». « La Cité sans Loi, d’un village du sud de l’Espagne, en Andalousie.

 

Des photos particulièrement fortes avec un mélange de portraits de rue et de scènes de vie.

 

Et donc le hasard…

 

En juillet, dès mes premiers pas dans les rues de Bourisp, je me suis dirigé vers la nouvelle exposition de Jeanne Taris « Gitans de Perpignan : et demain ? ».

Pour être franc, je suis resté un très long moment silencieux devant l’intensité de ces portraits de femmes, d’enfants, d’hommes de cette communauté gitane du quartier Saint-Jacques de Perpignan, avant de poursuivre la découverte d’autres photographes de ces JDR.

 

En pénétrant dans la cour d’une maison pyrénéenne, où le photographe Sébastien Arico exposait sont travail "L’homme et la bête", j’ai discuté quelques secondes avec une photographe qui était en train de préparer les légendes de ses photos…

 

"Avec beaucoup de retard" s’amuse-t-elle, "mais je suis rentrée hier soir, j’arrive des Rencontres d’Arles…"

 

Et ainsi, j’avais face à moi la photographe Jeanne Taris qui, avec beaucoup d’humilité, m’annonçait qu’elle était heureuse d’avoir remporté le "Leica International Galleries Portfolio Awards Italie", dans le cadre du prix "Voies Off 2018" aux Rencontres d’Arles.

 

Et c’est ainsi que le hasard me fit passer de très agréables heures en sa compagnie où nous avons pu discuter de notre passion commune de la photographie et où Jeanne a pu me raconter comment elle avait réussi à se faire accepter par la communauté gitane lors de ses deux reportages…

 

Jeanne vit au bord de l’océan, du côté du bassin d’Arcachon, et aurait aimé être correspondante de guerre. La vie en a décidé autrement et c’est peut-être la raison pour laquelle depuis son adolescence elle parcourt le monde, son Leica en bandoulière…

 

Mais attention, Jeanne ne porte pas le célèbre appareil comme certains photographes vaniteux. Si on regarde bien son Leica Q, on découvrira que la prestigieuse marque est masquée "pour éviter d’attirer les regards" et "rester la plus discrète possible".

 

Jeanne travaille au 28 mm ce qui lui permet d’être au plus près des personnages qu’elle immortalise. Pas question de s’éloigner, Jeanne ne peut se trouver qu’au cœur des scènes de vie quand elle regarde, cadre et appuie sur le déclencheur qu’elle apprécie particulièrement par son "silence".

 

Comment est née cette passion pour les Gitans ?

 

Certes, j’en suis conscient, je ne suis pas le premier (ni le dernier), à lui poser cette question. Jeanne se raconte tout simplement. C’est en Andalousie, qu’elle a commencé à travailler sur les Gitans. Elle rit encore quand elle se souvient que des proches lui avaient déconseillé de s’y rendre. Non seulement il lui en faut un peu plus pour renoncer à un projet, mais à la limite, c’est peut-être ce genre de conseils qui la poussent à foncer.

 

En Andalousie, Jeanne a découvert une communauté particulièrement attachante. Les photos découvertes l’an dernier à Bourisp en sont bien la preuve.

 

Après son passage en Andalousie, Jeanne s’est rendue en septembre 2016 à Perpignan, à Visa pour l’Image. C’était la première fois qu’elle se rendait à cette grande manifestation internationale du photojournalisme… et c’est en prenant une personne en co-voiturage qu’elle a appris qu’une importante communauté gitane vivait dans le quartier Saint-Jacques, dans le cœur historique de la ville de Perpignan.

 

Elle a vite "séché" le festival pour arpenter les rues du quartier, appareil en bandoulière, en discutant avec les femmes et en demandant la permission de prendre les enfants en photo.

 

Jeanne travaille sur le long terme, elle n’est pas de la génération "zapping". En un an, elle est revenue à Saint-Jacques, plusieurs fois, notamment pour Noël et la nouvelle année.

 

La force des photos que l’on peut découvrir dans ses deux reportages sur les Gitans en est la preuve irrémédiable.

 

Jeanne a été étonnée de découvrir une différence frappante entre les Gitans d’Andalousie et ceux de Perpignan. Elles trouvent ces derniers marqués par une grande tristesse.

 

Une communauté frappée de plein fouet par le fléau de la drogue et la disparition d’un vrai chef du quartier qui autrefois, arrivait à fédérer la communauté gitane.

 

Il y a aussi ce projet de réhabilitation par la mairie de ce quartier historique qui est à l’origine d’une forte polémique. La communauté Gitane craignant fort de faire les frais de cette réhabilitation et d’être obligée de partir en périphérie de la capitale du Roussillon.

 

Une deuxième exclusion…

 

Cette tristesse de la communauté gitane de Saint-Jacques, Jeanne ne l’a pas retrouvée quand elle s’est rendue au pèlerinage Gitan de Saintes-Maries-de-la-Mer en Camargue.

 

Bien au contraire…

 

Là encore, Jeanne s’est retrouvée au cœur des pèlerins "un peu par hasard" …

 

Ce hasard qui, en photographie, est souvent synonyme de belles rencontres !

 

Ce pèlerinage sera-t-il le thème de l’exposition de Jeanne, l’an prochain dans les rues de Bourisp ou de celles du Festival Barrobjectif en Charente ?

 

Entre temps, Jeanne s’est rendue à Cuba pour découvrir cette île en pleine mutation, quelques mois après la mort du leader maximo Fidel Castro.

 

Dans quelques jours, en septembre, je retrouverai Jeanne à Perpignan, à "Visa pour l’Image". Peut-être ma parlera-t-elle de ses prochains voyages, de ses futurs projets…

 

Ce qui est certain c’est que dans les prochains mois (années ?) on parlera de Jeanne Taris, car son travail étonnant de photojournaliste devrait nous réserver de belles surprises à l’avenir.

 

Si vous souhaitez découvrir Jeanne Taris, la revue "Six Mois" lui consacrera un dossier important, en septembre, lors de la sortie du numéro Automne-Hiver 2018.

 

L’an dernier, c’est la revue "Polka" qui avait publié son reportage sur les Gitans du quartier Saint-Jacques de Perpignan.

 

A titre personnel, j’émets de grandes réserves sur la façon dont les légendes, provenant de la rédaction du magazine, ont été accolées aux photos publiées, bien trop racoleuses.

 

Je regrette aussi le texte publié avec les photos où le sensationnel a pris le dessus sur le très beau travail de Jeanne.

 

Une photographe en immersion dans une communauté difficile qui tente de survivre et qui n’a certainement pas besoin d’être en plus caricaturé de la sorte.

 

 

(Photo © Paul Tian)

(Photo © Paul Tian)

(Photo © Paul Tian)

(Photo © Paul Tian)

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La démocratie, ce n'est pas la loi de la majorité, mais la protection de la minorité (Albert Camus)