Du côté de chez Jachri : "L’homme sans ombre" de Joyce Carol Oates
Avant de lire le dernier roman de Joyce Carol Oates, "Un livre de martyrs américains", j’ai dévoré "L’homme sans ombre" paru en 2018.
Comment vivre son présent quand la mémoire ne garde plus que 70 secondes les nouvelles informations de sa vie avant qu’elles ne s’effacent ? C’est le sujet épatant de cet opus. Les nouveaux visages, rencontres, apprentissages deviennent perpétuellement nouveaux, dans cette forme d’amnésie.
"La reconnaissance d’un visage : Le premier acte mental du nourrisson. Car la survie dépend de cette reconnaissance. C’est le plus élémentaire, le plus primitif et le plus profond des actes humains".
Et s’il reste des souvenirs du passé, y a-t-il encore un futur ?
Elihu Hoopes a 37 ans quand son cerveau est gravement endommagé par une encéphalite en 1965. Il aura toujours 37 ans et gardera toujours des souvenirs d’avant mais rien de sa vie d’après. "Une personne peut-elle être sans ombre ? Sans mémoire, on est comme une ombre".
L’étude du cerveau n’en est qu’à ses balbutiements, alors.
Margot Sharpe est une jeune et ambitieuse chercheuse en neurobiologie quand ce patient intègre son service pour être étudié par des tests et elle en fait son sujet privilégié pendant 30 ans.
Si, pour lui, chaque rencontre avec Margot est nouvelle, pour cette dernière, la relation va être beaucoup plus filandreuse… et on retrouve les thèmes récurrents chez l’auteure qui creuse dans la complexité humaine, ombre et lumière.
Magistral, fascinant, ambigu, touchant, passionnant !