Disparition de Chuck Yeager : quand la légende américaine de l'aviation était en tournage à Saint-Béat
Chuck Yeager dans le cockpit du Bell X-1 supersonic research aircraft baptisé "Glamorous Glennis" (Photo du Department of the Air Force prise en mai 1948/Wikipedia)
La légende de l’aviation américaine Charlie "Chuck" Yeager est morte à l’âge de 97 ans le 7 décembre dernier.
Pilote durant la Seconde Guerre mondiale, Yeager a fait son entrée dans l’histoire en brisant le mur du son en 1947 à bord d’un appareil Bell X-1.
C'est son épouse, Victoria Yeager, qui a annoncé sa disparition sur Twitter :
Je vous annonce avec beaucoup de tristesse que l’amour de ma vie, le général Chuck Yeager est décédé... Une vie incroyable, bien vécue, le plus grand pilote de l’Amérique et son héritage de force, d’aventure et patriotisme seront pour toujours dans nos souvenirs
Joëlle Calmels était correspondante de "La Dépêche" quand, il y a dix ans, elle a rencontré la légende de l'aviation américaine lors d'un tournage d'un reportage à Saint-Béat. Elle se souvient sur mon blog et je l'en remercie chaleureusement.
Charles Elwood Yeager, légende américaine de l’aviation, est mort à l’âge de 97 ans, le lundi 7 décembre dernier. Dix ans plus tôt, j’avais eu la chance de l’interviewer alors qu’il était en tournage à Saint-Béat pour un reportage américain retraçant son histoire. Avec la simplicité qui le caractérisait, "Chuck" Yeager s’était livré sur cet épisode marquant de sa vie.
Nous sommes en mars 1944, l’hiver est rigoureux. Le pilote de chasse a sauté quelques jours plus tôt en parachute alors que son avion s’écrasait au sol, abattu dans le ciel du Lot et Garonne. Aussitôt pris en charge par le maquis de Nérac, le pilote de l’US Army Air Corps est soigné puis emmené près de la frontière espagnole avec six compagnons dans un camion bâché qui les dépose en pleine nuit dans les rues de Saint-Béat.
Arrivés sur les bords de la Garonne par une nuit glaciale, les combattants s’extraient du véhicule et s’enfuient vers la montagne. Deux d’entre eux, mieux habitués aux conditions climatiques, distancent les autres, crapahutant dans la montagne enneigée. A bout de fatigue, ils se réfugient dans une cabane et commencent à se restaurer avec une chèvre morte qu’ils ont trouvé sur leur chemin, faisant sécher leurs vêtements mouillés par la neige.
"J’étais habitué à ce climat qui ressemble à ma Virginie natale. J’avais 21 ans, les Pyrénées me rappelaient la maison, mes Appalaches où j’ai grandi." m’avait confié Chuck.
Mais le repos bien mérité ne dure pas longtemps.
A cause d’une chaussette oubliée à l’extérieur par son compagnon, les soldats allemands en alerte, les repèrent et mitraillent la cabane. Les deux hommes parviennent tout de même à s’enfuir et à passer en Espagne. Cette traversée éprouvante des Pyrénées ne s’achève pas pour autant. Devant l’œil de la caméra, l’homme explique son passage à Bossost, son arrestation et évasion de Sort puis son périple à travers toute l’Espagne, jusqu’à Gibraltar d’où il peut regagner Londres et reprendre les combats. Il est alors crédité d’une douzaine de victoires aériennes lors du conflit mondial.
Le documentaire américain tourné ce jour-là à Saint-Béat et au Val d’Aran, dans les pas du Général Chuck Yeager a permis d’immortaliser le destin hors du commun d’un des derniers as de l’aviation, pilote de chasse exceptionnel qui fut le premier à franchir le mur du son en 1947.
A l’issue du conflit, Chuck Yeager devint pilote instructeur et pilote d’essai dans l’US Army. C’est aux manettes d’un Bell X1, qu’il sera le premier homme à franchir le mur du son, le 14 octobre 1947.
Depuis, le général Chuck Yeager a eu entre les mains nombre d’avions de légende dont le fameux A 380 qu’il a piloté lors d’un de ses passages à Toulouse.
Ses exploits en tant que pilote d’essais ont été immortalisés dans le film "L’étoffe des héros", son rôle y est interprété par Sam Shépard. Cette éblouissante rencontre avec un des as de l’aviation américaine m’a permis de croiser the "fastest man alive" (surnommé l’homme vivant le plus rapide) au destin exceptionnel et de garder le souvenir d’un monsieur charmant et très abordable.
Un souvenir inoubliable. Ce n’est pas tous les jours qu’on croise un héros vivant !
Joëlle Calmels