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24 Jan

Thermes. Les communistes du Pays de Luchon écrivent au maire Eric Azémar : "il n'est pas dans l'intérêt de Luchon que vous signiez cette DSP"

Publié par Paul Tian  - Catégories :  #Luchon, #Thermes, #DSP, #PCF, #Pays de Luchon, #privatisation, #Eric Azémar, #économie, #santé, #tourisme, #social, #Arenadour, #Occitanie, #Pyrénées, #Haute-Garonne

(Photo illustration : archives © Paul Tian)

(Photo illustration : archives © Paul Tian)

Suite au conseil municipal du 23 décembre dernier où le conseil municipal a autorisé le maire de Luchon à signer la DSP des Thermes au groupe "Arenadour", le PCF du Pays de Luchon a adressé la lettre suivante à Eric Azémar pour lui demander de ne pas signer cette DSP en l'état actuel du dossier :

"Le Conseil Municipal du 23 décembre vous a autorisé à signer (à l'unanimité moins une abstention) le contrat de délégation de service public (DSP) des Thermes.

Nous tenons à vous faire part de notre appréciation sur la privatisation à laquelle vous êtes en train de procéder.

Rappelons notre position de fond exprimée avec constance :

  • Oui, il est urgent d'investir massivement pour rattraper un sous-investissement chronique,
  • Non, la privatisation n'est pas la solution,
  • Choisissons une gestion publique rénovée des thermes par la création d'une Société Publique Locale (SPL) ou d'une société d'économie mixte (SEM) dans laquelle la Commune de Luchon aurait toute sa part.

C'est possible avec le concours du Conseil Départemental et du Conseil Régional, mais cette option a été hélas écartée.

Pourtant, les exemples de Balaruc les Bains, d' Aulus les Bains ou de Balnea-Loudenvielle en montrent la pertinence et la faisabilité.

Que penser de ce contrat de DSP, de sa préparation, de son contenu ?

  • Ce contrat a t'il été présenté aux citoyens de la ville pour information, concertation, codécision (un conseiller municipal avait proposé en 2019 un référendum local sur ce sujet) ?
  • Ce contrat est-il bénéfique pour les habitants de Pays de Luchon ?

Constat :

1) Les luchonnais, les salariés des thermes, les médecins thermaux, les associations, les syndicats n'ont jamais été sérieusement informés, ni concertés, ni associés.

Ils n'ont jamais eu connaissance du projet de contrat ni de ses annexes (dette des thermes,....), ni des rapports des bureaux d'étude évoqués lors du conseil municipal.

Rien de précis n'a été publié dans le bulletin municipal ou sur le site internet de la commune.

Aucune réunion publique d'information n'a été organisée pour recueillir les avis des intéressés.

C'était pourtant un de vos engagements.

2) Ce projet de contrat n'est pas bénéfique pour notre ville et la prive de ressources utiles pour son développement :

Il comprend trop d' insuffisances sur le plan financier (faiblesse de la redevance payée par l'exploitant), sur le plan technique, sur le plan organisationnel, sur le plan environnemental et sur le plan social.

Cela a été souligné par plusieurs conseillers le 23 décembre et constaté en partie par les bureaux d'études chargés d'analyser l'offre d'Arenadour.

Précisons quelques points :

En octobre 2019, la commune a négocié avec un seul repreneur Arenadour (un des 4 grands groupes capitalistes du thermalisme français) un « marché » de 360 M€ de chiffre d'affaires sur 30 ans et s'est placée d'emblée en position de faiblesse.

Pour élaborer son offre, Arenadour a constitué un groupement avec l' Agence Régionale d'Aménagement et de Construction -ARAC- (une SEM au capital de 27 millions d'€ dont la Région est l'actionnaire principal suivi par la Caisse des Dépôts) et Patrimoniale Occitanie SA qui est une filiale de l'ARAC.

Sans l'implication forte de la Région et de la Banque des territoires en apports de fonds publics, Arenadour ne pouvait prétendre à la reprise.

Il est clair que la Région aurait accompagné un projet de gestion publique rénovée et d'extension / modernisation des Thermes si nos élus locaux avaient fait ce choix.

Le partage de la reprise entre l'ARAC et Arenadour manque de clarté :

Nous pensons comprendre que le groupement se partage le travail :

  • d'un côté, une société de construction, la SOCIETE IMMOBILIERE DE LUCHON (SIL) SAS créée le 4 août 2021 par la SAS Patrimoniale Occitanie (filiale de l'ARAC) et la Caisse des Dépots et Consignations

La SIL est une société par action simplifiée au capital de 1.000 EUR.

Elle réalisera le projet immobilier pour 35,6 millions d'€ dont seulement 23,5 M€ de travaux.

Le financement du projet est assuré (à 95%?, à 100%?) par des fonds publics dont 1,2M€ de subvention de la ville de Luchon.

Il semble que la SIL qui fera payer un loyer (1,578 million d'€ par an) à la SETL et remboursera l'emprunt souscrit (14,1 millions d'€) pour payer les travaux, va prospérer avec un taux de rentabilité de 6,2%.

On peut observer que le taux de 2,5% auquel l'emprunt est souscrit est étonnement bien plus élevé que le taux actuellement pratiqué.

  • de l'autre, la Société d'exploitation de Thermes de Luchon (SETL), créée par Arenadour en novembre 2020, exploitera les thermes pendant 30 ans à compter du 1er Janvier 2023.

La SETL est une société par action à associé unique (SASU) au capital de 10000 €.

A terme, elle versera des dividendes à ses actionnaires au détriment de ses salariés et de l'investissement.

La commune est totalement écartée de la SIL (société de construction).

Et pourtant, elle participe au financement des travaux (subvention de 1,2 million d '€ à cette société).

Elle aura juste droit à un rapport annuel fourni par l'exploitant privé.

Les luchonnais ont l'expérience de ces rapports comme ceux que Suez doit remettre au titre de la DSP sur l'eau et l'assainissement et qui n'ont jamais fait l'objet d'information et d'un réel débat citoyen.

La commune perdra de l'argent : elle ne percevra que 6,150 millions d'€ (hypothèse haute) en 30 ans alors qu'elle aurait reçu au minimum 15,780 millions d'€ (hypothèse basse calculée sur la redevance versée par les Thermes en 2018).

Détaillons le contrat : il prévoit que la commune recevra :

  • avant le 31 juin 2023 (ou 2022 selon la mairie?), 3,5 Millions d'€ au titre d'un droit d'entrée. Cette somme correspondrait au montant de la dette des thermes provenant des emprunts souscrits par la ville pour réaliser des investissements aux thermes et non encore remboursés.

[Cela signifie-t'-il que la commune remboursera par anticipation la totalité de la dette des thermes dès 2023 et qu'ainsi elle ferait l'économie des intérêts des emprunts, intérêts estimés à 91 000€ par an (!!), montant que vous avez indiqué le 23 décembre?

N'ayant pas l'information sur le détail de cette dette, nous vous remercions de nous éclairer sur ce point.]

  • chaque année pendant 30 ans

- 30 000 € par an de redevance fixe,

- 20 000 € par an de taxe foncière (la régie des thermes n'y était pas soumise).

 [Pourriez-vous nous préciser sur quelle base d'imposition cette somme a été calculée ?]

  • chaque année à partir de 2029 : une redevance variable, versée à la condition que la SETL fasse des bénéfices, égale à 5% du résultat d'exploitation hors frais de siège et plafonnée à 50 000 €.

[ Remarque : le chiffre d'affaire et le résultat de l'exploitant n'ont-ils pas été sous-estimés pour minorer le plus possible la part variable et en différer le versement?]

Calculons les recettes sur 30 ans (durée de la concession à Arenadour) :

en 30 ans de privatisation (de 2023 à 2052), la commune ne percevra que 6,150 millions d'€ (hypothèse haute) décomposés comme suit :

3,5 millions d'€ (droit d'entrée versé en 2022) + 900 000 € (redevance fixe de 30k€ par an pendant 30 ans) + 600 000 € (taxe foncière de 20 000 € par an pendant 30 ans) + 1 150 000 € au mieux de redevance variable (50 000 € maximum par an pendant 23 ans).

[Ce montant ne serait que de 2,1 million d'€ si la commune devait verser 4 millions d'€ à la société de construction à la fin de la concession (en 2053)] dans l'hypothèse ou elle ne trouve pas de repreneur.]

Cela peut paraitre important mais comparons ce montant avec ce que les Thermes gérés en régie auraient pu rapporter à la commune :

Pour ce calcul, retenons le montant de 526 000 € (pour 11456 curistes) que le budget principal de la commune a reçu des thermes en 2018 (mais n'oublions pas que le montant de cette « redevance », qui dépassait 1 M€ dans les années 1980, est la plus faible depuis 35 ans).

Extrapolons ce résultat sur 30 ans :

Il en résulte qu'en 30 ans de gestion publique, la commune aurait pu perçevoir au minimum 15,780 millions d'€ (526 000 € X 30) et 30 millions d'€ en cas de forte relance de l'activité.

Dans le cas ou les élus auraient fait le choix d'une gestion publique par une SPL, ce montant aurait été réparti différemment entre la commune et la SPL.

Conclusion

  • notre ville est la grande perdante dans ce contrat.

 Les employés des thermes sont les grands oubliés :

Conditions de «reprise» des titulaires, des saisonniers et des temporaires, précarité des emplois, réintégration dans les emplois communaux des titulaires qui choisiront de rester employés communaux et impact financier sur le budget communal sont des questions essentielles.

Le conseil municipal du 23 décembre n' a pas eu un échange sur ce point.

Pourtant depuis 1945, les employés des thermes ont su faire preuve de leur capacité à préserver leur outil de travail et à dispenser les soins thermaux, même dans des conditions de plus en plus difficiles.

D'autres points du contrat mériteraient d' être soulevés mais les observations ci-dessus sont, à nos yeux, les principales.

En conclusion, nous pensons qu'il n'est pas dans l'intérêt de Luchon que vous signiez cette DSP.

Nous suggérons qu'une information complète soit fournie aux luchonnais et qu'ils soient ensuite consultés sur ce projet de privatisation.

Nous vous remercions de nous adresser les informations dont vous disposez et qui préciseraient ou corrigeraient nos analyses.

Et soyez assuré que, comme nous l'avons dit en mars 2020, nous regardons sans à priori les projets des nouveaux élus et l'application de leurs engagements.

Nous approuvons tout ce qui nous paraît bénéfique à Luchon et nous sommes attentifs à alerter les luchonnais sur les projets qui nous paraissent contraires à leurs intérêts."

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"Aucune carte du monde n'est digne d'un regard si le pays de l'utopie n'y figure pas" (Oscar Wilde)