Hommage à Samuel Paty : lire et relire la lettre d'Albert Camus à son instituteur
C'est probablement le plus bel hommage que l'on peut rendre à Samuel Paty, professeur d'Histoire-Géographie, assassiné par le fanatisme religieux, il y a deux ans, le 16 octobre 2020, près de son collège de Conflans-Saint-Honorine, dans les Yvelines, en (re) lisant cette lettre d’Albert Camus à instituteur, Monsieur Germain, écrite en 1957 alors qu’il vient de recevoir le Prix Nobel de Littérature :
19 novembre 1957
Cher Monsieur Germain,
J’ai laissé s’éteindre un peu le bruit qui m’a entouré tous ces jours-ci avant de venir vous parler un peu de tout mon cœur. On vient de me faire un bien trop grand honneur, que je n’ai ni recherché ni sollicité. Mais quand j’ai appris la nouvelle, ma première pensée, après ma mère, a été pour vous. Sans vous, sans cette main affectueuse que vous avez tendue au petit enfant pauvre que j’étais, sans votre enseignement, et votre exemple, rien de tout cela ne serait arrivé. Je ne me fais pas un monde de cette sorte d’honneur mais celui-là est du moins une occasion pour vous dire ce que vous avez été, et êtes toujours pour moi, et pour vous assurer que vos efforts, votre travail et le cœur généreux que vous y mettiez sont toujours vivants chez un de vos petits écoliers qui, malgré l’âge, n’a pas cessé d’être votre reconnaissant élève.
Je vous embrasse, de toutes mes forces.
Albert Camus