L'artiste plasticienne Marie Colombie expose à Montréjeau et Toulouse et nous parle de son rendez-vous parisien au ministère de la Culture
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Actuellement, l’artiste tarnaise Marie Colombie, mais Luchonnaise de cœur, a une actualité pour le moins chargée, ce qui n’étonnera guère celles et ceux qui la suivent depuis quelques années.
À Montréjeau, "c’est une exposition que je fais dans le cadre du label Tourisme et Handicap" m’explique Marie, "pour les deux premières années, le confinement a vraiment compliqué la situation, mais depuis l’an dernier, tout est rentré dans l’ordre…"
La responsable de l’Office de Tourisme de Montréjeau, Céline Gras Baque, organise des méditations avec les scolaires et les Ehpad pour cette exposition, d’une quinzaine de tableaux, dont le titre "Envole nous" est un clin d’œil à la chanson de Jean-Jacques Goldman.
"Ne pas accepter la fatalité qui nous colle à la peau pour voler ensemble vers un monde plus uni" m’explique Marie qui a toujours au fond d’elle les ressources nécessaires pour faire naître l’espoir d’un monde meilleur…
(Exposition à l'Espace André Marquerie, Office intercommunal de Montréjeau, jusqu'au 3 mai)
Depuis la semaine dernière, Marie expose également à Toulouse, au centre culturel de "La Brique Rouge" dans le cadre de "Perceptions multiples".
"Il y a dix-huit mois, j’ai eu la chance de rencontrer le CTEB et le responsable du service Vie Sociale et Handicap de la ville de Toulouse et Métropole… et depuis Toulouse m’inclue dans ses manifestations. J’en suis heureuse et ravie, car ce sera pour moi l’occasion de travailler avec les Chemins Buissonniers…"
Et en dehors de l’actualité des expositions, je sais que tu as été récemment à Paris au ministère de la Culture. Tu peux nous en dire plus ?
"Effectivement, nous avons été reçues au ministère de la Culture par le Haut fonctionnaire chargé du handicap et de l’inclusion…"
Je te coupe Marie, mais comment as-tu réussi à décrocher ce rendez-vous parisien ?
Mais c’est très simple, Paul… J’ai pris ma plume et j’ai envoyé, le 8 janvier dernier, une lettre à Madame Brigitte Macron pour lui demander une audience afin de lui présenter "Arts dans tous les sens" tout en lui parlant de l’inclusion et de notre souhait de faire tomber les barrières de la différence…
Quel culot ! (rires)
Marie poursuit :
En 2022 j’avais été présentée à la secrétaire d'Etat chargée des Personnes Handicapées de l’époque, Sophie Cluzel, à l’occasion du Festival TV de Luchon… Mais, tout le monde me disait que cette rencontre ne servirait à rien… Et bien si ! Là, pour le coup je pense que cette rencontre a été l’élément déclencheur pour le déplacement parisien…
Et Marie recevait, le 31 janvier, une réponse du cabinet de Brigitte Macron dans laquelle on lui indiquait qu’au vu de ce qu'elle faisait, les services de l’Élysée avaient transmis son courrier aux ministères concernés (Handicap et Culture).
Quelle a été ta réaction en recevant cette réponse ?
Franchement, je me suis dit 'bon c’est sympa pour mon Ego mais cela n’ira pas plus loin'… et le 20 février, j’ai reçu un mail d’un haut fonctionnaire du ministère de la Culture qui me proposait un rendez-vous à Paris, pour le 14 mars… et une lettre de la ministre qui me félicitait pour mon travail !
Là ça devenait du sérieux !
Oui, oui… J’ai tout de suite prévenu Chantal Rubio et Marianne Pradere, mes partenaires de projets et amies et on a mis tout en place pour partir à Paris. Dans le train du retour, le 14 mars, j’ai reçu un mail, cette fois du ministère du Handicap, pour nous proposer une visio, début avril…
As-tu une botte secrète Marie ?
Non, non, aucune botte secrète si ce n’est mon désir le plus profond de faire connaître une exposition réalisée avec des non-voyants et des malvoyants où chacun est acteur… ce qui est en fait unique.
Et alors ce rendez-vous au ministère de la Culture ?
Il s’est très très bien déroulé, durant près de deux heures… On souhaitait faire connaître notre exposition et surtout, il était important que cela dépasse les frontières de l’Occitanie. Et en fait cela a dépassé nos espérances puisque Thierry Jopeck, en face de nous, nous a dit que c’était monté jusqu'à la présidence de la République...
Et Marie de poursuivre, avec ce bel enthousiasme qui la caractérise :
Je dois dire que pendant six ans nous avons bien évolué et que le soutien populaire, la chaîne humaine formée autour de cette exposition nous a permis d’aborder cette rencontre avec des bases solides… Participer à Villes pour tous était un bon point puisque Thierry Jopeck siège à la commission du label "Destination pour tous", et le fait que j’expose dans les deux labels Villes pour tous et Tourisme et Handicap était un plus très important. Nous étions là pour obtenir des clés pour ouvrir des portes verrouillées… Nous avons été entendues. Il nous a donné des pistes et des conseils très judicieux. C’était une très belle rencontre avec une personne très à l’écoute qui a même accepté de découvrir deux tableaux avec un bandeau sur les yeux…
Chantal Rubio est la présidente de l'association "Pourquoi pas moi ?" Peux-tu nous parler de cette association ? Et comment es-tu venue à travailler avec l'association ?
C’est une association qui s’occupe de déficients visuels. Elle les aide dans leurs parcours si difficiles pour justifier leur handicap et obtenir leurs droits. Une bataille difficile au pays des droits de l’Homme, comme tu peux l'imaginer. Chantal est déficiente visuelle, elle ne voit que de près, de loin tout est flou.
C’est à Luchon en 2017 que je l’ai rencontrée avec ses mousquetaires comme elle dit avec humour, à l’occasion du Festival TV. Ils présentaient Mon cinéma sans images avec Jean Musy et Anne Marie David et sur scène, ils ont expliqué qu’ils avaient pris des photos à l’émotion dans les Chapelles d’Occitanie et qu’ils aimeraient les voir... mais à part les imprimantes 3D, personne ne savait mettre des photos en relief. J’étais dans la salle et j’exposai aux Thermes…
C'était le déclic ?
Nous nous sommes rencontrés et je leur ai présenté mes tableaux Puis, j’ai travaillé AVEC eux et pas pour eux ! C'est très important de le préciser. Et c'est ainsi que nous avons créé Art dans tous les sens, à partir du projet pensé par Chantal Rubio et mis en place avec Marianne Pradere, la photographe professionnelle et donc moi, qui les a rejointes en fin de parcours…
"L'art dans tous les sens" est une exposition tactile et sensorielle. C'est à dire ?
Ce sont des photos à l’émotion prises par des mal voyants et des non voyants accompagnés de Marianne. Je les ai sculptées, mais pour qu’elles soient lisibles au toucher j’ai modifié ma façon de travailler, j’ai mis de la photo toile et de la photo papier, des résines translucides.
En fait, grâce à eux, mon travail est devenu plus fin, plus beau... il y a plus de détails et moins de découpage. C'est magique pour moi cette évolution dans mon art. Ils m'ont fait sortir de ma zone de confort.
Si nous avons pu avancer ainsi, c'est que nous avons travaillé ENSEMBLE et pas pour mais avec…Notre but premier était de faire avancer un projet, car il faut savoir que dans l'exposition Art dans tous les sens ou même dans mes expositions Carlos, Gérard, Serge atteints de cécité totale sont capables et de décrire mes tableaux, de les faire découvrir aux autres, tout comme Sylvie ou Brigitte, déficientes visuelles...
Lorsqu'ils sont là, je les laisse guider et expliquer aux visiteurs : ils le font bien mieux que moi ! Dans une société qui exclue la différence, c'est important d'y retrouver une place...
Et quel serait ton souhait le plus cher pour les prochains mois ?
Mon souhait le plus cher, ce serait que les non-voyants sachent que cela existe et que voir des photos sculptées c'est possible !
Pour moi, je suis comblée : mon carnet d'expositions est plein jusqu'en octobre... et Paris c'est fait avec le ministère de la Culture, je ne pouvais pas rêver mieux !
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A Paris, Chantal Rubio au ministère de la Culture fait découvrir une photo sculptée de Marie à Thierry Jopeck
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A Luchon, en 2022, à l'occasion du Festival TV, Marie Colombie avec la secrétaire d'Etat Sophie Cluzel et le maire Eric Azémar
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"Trois femmes pour un projet" : Marianne Pradere, Marie Colombie et Chantal Rubio ( de g. à d.)
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